
L’homologation de la NEP 600 « Audit des comptes de groupe (y compris l’utilisation des travaux des auditeurs des composants) – aspects particuliers » constitue une évolution structurante pour les missions d’audit de groupe en France. Cette norme d’exercice professionnel encadre l’intervention de l’auditeur de groupe lorsqu’il s’appuie sur les travaux d’auditeurs de composants (filiales, coentreprises, entités mises en équivalence, succursales, véhicules ad hoc), avec un accent renforcé sur la planification fondée sur les risques, la direction et la supervision des travaux délégués, la communication inter-firmes et l’évaluation critique de la suffisance et de l’appropriation des éléments probants.
Pour les compliance officers, responsables de contrôle interne et d’audit interne, la NEP 600 a des impacts opérationnels immédiats : articulation des responsabilités entre l’auditeur de groupe et les auditeurs des composants, exigences documentaires accrues, alignement avec les référentiels prudentiels (EBA/ESMA) et les attentes de place sur la gouvernance, la qualité d’audit et la gestion des risques de fraude et de continuité d’exploitation au niveau consolidé.
La NEP 600 s’applique aux audits des comptes consolidés ou combinés lorsqu’un auditeur de groupe s’appuie, pour tout ou partie, sur les travaux d’auditeurs des composants. Un « composant » désigne une entité ou une activité faisant partie du périmètre de consolidation et susceptible d’être significative par sa taille, sa nature ou son risque. L’« auditeur de groupe » demeure seul responsable de l’opinion sur les comptes du groupe et ne peut se décharger de cette responsabilité sur les auditeurs des composants. L’« auditeur des composants » réalise des travaux qui contribuent aux objectifs d’audit du groupe selon des instructions précises et une supervision effective.
La norme renforce les attentes en matière de gouvernance de mission :
L’auditeur de groupe segmente les composants selon la significativité et le profil de risques. La portée combine :
La NEP 600 insiste sur des instructions écrites, complètes et traçables : objectifs d’audit, seuils de matérialité, risques identifiés par l’auditeur de groupe, domaines nécessitant une réponse spécifique (transactions intra-groupe, éliminations, instruments financiers, avantages post‑emploi, tests d’impairment, fiscalité, reconnaissance du revenu, provisions et engagements, estimations comptables sensibles). Les instructions cadrent les attentes sur l’éthique, l’indépendance, la documentation, les délais et le format de reporting. La communication bidirectionnelle doit être continue, structurée, et permettre des ajustements de portée en cours de mission.
La direction et la supervision par l’auditeur de groupe comportent :
Lorsque des restrictions d’accès existent (juridictions, secret professionnel, embargos), l’auditeur de groupe met en place des mesures de contournement conformes à la déontologie (revue sur site sécurisé, data rooms, affidavits, procédures supplémentaires) et évalue l’incidence sur l’opinion.
L’auditeur de groupe demeure responsable d’apprécier si les éléments probants collectés via les composants sont suffisants et appropriés. La norme encourage l’usage d’analyses de données, de tests substantifs ciblés sur les zones de risque et de tests de contrôles lorsque c’est efficient au regard de l’environnement de contrôle interne. Les anomalies identifiées localement doivent être agrégées et évaluées au regard de la matérialité groupe, avec attention particulière aux corrections proposées et aux anomalies non corrigées.
La NEP 600 met l’accent sur :
Les procédures doivent couvrir la fiabilité des éliminations intra-groupe, la cohérence des politiques comptables, la conversion des devises et la qualité des rapprochements entre le reporting des composants et le référentiel consolidé. Une attention particulière est attendue sur les flux complexes (prix de transfert, instruments financiers intragroupe, garanties croisées, cash‑pooling), ainsi que sur la qualité des contrôles du process de consolidation.
La coordination avec des auditeurs de composants situés dans d’autres juridictions repose sur des plateformes sécurisées, des protocoles d’échange de fichiers, et des règles de protection des données. L’auditeur de groupe veille à la traçabilité des jeux de données utilisés, à la gouvernance des modèles et à la gestion des accès. Les limitations technologiques ou réglementaires (data residency) doivent être identifiées en amont et adressées dans la stratégie d’audit.
Pour les fonctions conformité et contrôle interne, la norme appelle à renforcer :
La communication aux organes de gouvernance couvre la portée retenue, les principaux risques, les observations significatives au niveau des composants et les impacts agrégés. En présence de limitations d’étendue, d’incertitudes majeures ou de désaccords, l’auditeur de groupe évalue l’effet sur l’opinion (modifications, paragraphes d’observation, impossibilité de conclure) et documente les bases factuelles.
Finance, assurance, industrie, santé, énergie et services digitaux présentent des schémas de risques spécifiques : valorisation d’instruments complexes, provisions techniques, tests d’impairment industriels, risques réglementaires santé, exposition carbone et engagements ESG, dépendance à des plateformes technologiques et à des données personnelles. La NEP 600 invite à une couverture ajustée par secteur et à un dialogue renforcé avec les fonctions risques et conformité.
L’homologation de la NEP 600 s’inscrit dans une convergence avec les attentes prudentielles et de marché publiées par l’EBA et l’ESMA, notamment sur la gouvernance des modèles, la transparence des estimations comptables, la gestion des risques de crédit et de marché, et la fiabilité de l’information financière publiée. Les entités régulées doivent veiller à l’alignement entre leurs exigences internes et les attentes des autorités nationales (AMF, ACPR) en matière de qualité de l’information financière et de contrôle interne.
La norme renforce la nécessité d’une documentation claire : matérialités, rationales de portée, instructions aux composants, communications, conclusions et bases de jugements clés. La traçabilité doit permettre une revue ex‑post par la gouvernance, les autorités ou des inspections de qualité, y compris sur les échanges entre firmes et les arbitrages réalisés.
Les groupes multi‑juridictionnels devront investir dans :
L’homologation de la NEP 600 clarifie le partage des rôles, élève les exigences de planification, de supervision et d’évaluation des éléments probants, et renforce la création de valeur pour la gouvernance des groupes. Pour les fonctions conformité et risques, elle offre un cadre d’articulation plus robuste avec l’audit externe et une opportunité d’améliorer la fiabilité de l’information consolidée.

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