
L’entretien de M. Dalles, relayé par l’Association Monégasque des Services Financiers (AMSF), via une référence à moneylaundering.com, intervient dans un contexte d’intensification des exigences de Lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB‑FT) et de sanctions financières internationales. La place financière monégasque, étroitement interconnectée avec l’Union européenne (UE) et la France, poursuit une trajectoire de renforcement de son dispositif prudentiel et de conformité, dans le sillage des recommandations du GAFI et des attentes des superviseurs (ACPR/AMF en France, CSSF au Luxembourg, et les autorités européennes EBA/ESMA). Cet article synthétise les principaux enseignements stratégiques que des compliance officers francophones expérimentés peuvent tirer d’un tel échange : cartographie des risques, diligences renforcées, qualité des déclarations de soupçon, gouvernance et contrôle interne, data & KYC, sanctions et gel des avoirs, ainsi que convergence réglementaire européenne.
Un entretien de cette nature met classiquement en lumière la transformation de la conformité LCB‑FT, passée d’un formalisme de procédures à une recherche d’« effectiveness ». Pour un établissement bancaire, une société de gestion, un PSP ou un acteur crypto, cela implique :
1) Évaluation et appétence aux risques : l’approche fondée sur les risques (RBA) exige une cartographie finement segmentée par clientèle, produits, canaux et géographies. Elle se matérialise par une appétence formalisée, des seuils d’alerte, des règles d’escalade et une logique de « dynamic risk rating » qui tient compte des événements, des signaux externes (listes de sanctions, PEP, adverse media) et des comportements transactionnels.
2) Diligences KYC et vérifications continues : la qualité d’identification (personnes physiques et morales), la vérification de l’UBO, la compréhension de la finalité/objet de la relation d’affaires, et la mise à jour périodique (ongoing due diligence) restent les fondations. L’interview souligne en filigrane l’importance des diligences renforcées sur les expositions à haut risque (PEP, juridictions sensibles, secteurs cash‑intensifs, structurations opaques, crypto‑actifs).
3) Monitoring des transactions et scénarios : sont attendus des scénarios calibrés sur les typologies pertinentes, avec seuils, segmentation, corrélations d’événements, et un back‑testing documenté. L’efficacité se mesure par la pertinence des alertes, la réduction des faux positifs sans dégrader la capacité de détection, et la capacité à investiguer et tracer les décisions.
4) Déclarations de soupçon et coopération : la qualité des Suspicious Transaction/Activity Reports exige clarté du narratif, articulation des faits, motifs, flux, contreparties, et pièces. Le suivi post‑déclaration (demande d’information, gel des avoirs) est un indicateur clé de maturité. Les autorités attendent une coopération fluide, des délais maîtrisés et une conservation probante des éléments.
La montée en puissance des régimes de sanctions (géopolitiques, prolifération, cyber, droits de l’homme) impose des chaînes de décision rapides, une couverture outillée (listes, fuzzy matching, screening en temps réel), et une gouvernance solide : référentiel à jour, gestion des exemptions et licences, ainsi que la capacité de geler/dégeler sans faille. Dans un espace financier interconnecté (Monaco, UE, marchés internationaux), la cohérence et la traçabilité des décisions sont déterminantes pour éviter les violations primaires ou secondaires.
Les autorités attendent une articulation claire : première ligne propriétaire du risque, deuxième ligne garantissant la robustesse du cadre LCB‑FT et la qualité des contrôles, troisième ligne évaluant l’efficacité et l’alignement stratégique. Le ton au sommet, la responsabilisation du top management (risques et conformité à l’agenda du Conseil), la qualité des reportings (KRI, KPI, incidents, remédiations) et la montée en compétence des équipes forment le socle d’un dispositif crédible. Une interview avec un dirigeant de place rappelle la nécessité d’un investissement durable dans les compétences, la donnée et les outils.
Les dispositifs performants combinent : référentiel clients unifié, gouvernance des données (qualité, traçabilité, lineage), screening multi‑listes (sanctions, PEP, adverse media), moteurs de détection configurables, et investigation augmentée (réseaux et liens, graph analytics). Le recours à l’IA est pragmatique : explications auditables, biais maîtrisés, conformité au RGPD et principes de proportionnalité. Les gains ciblent la pertinence des alertes, la vitesse d’investigation et la documentation probante.
La consolidation du cadre européen (paquet AML, supervision renforcée, standards EBA/ESMA) incite les places financières à converger : alignement des diligences, harmonisation des contrôles, attentes renforcées en matière d’outsourcing et d’externalisation intragroupe, et surveillance des innovations (crypto, paiements instantanés, plateformes). Pour des groupes transfrontières, la cohérence groupe‑filiale et l’applicabilité locale sont scrutées, tout comme la capacité à démontrer l’« effectiveness » au-delà de la conformité documentaire.
La diffusion d’interviews par des associations sectorielles et des médias spécialisés soutient la circulation des bonnes pratiques, la pédagogie réglementaire et l’alignement des acteurs économiques avec les attentes des autorités. Pour les compliance officers, ces contenus sont des catalyseurs : benchmark de dispositifs, retours d’expérience, signaux faibles sur les priorités des superviseurs.
Au quotidien, un tel échange confirme l’impératif d’une approche « risk‑based » incarnée : une gouvernance claire, des politiques à jour, des procédures exécutables, des contrôles ciblés, une donnée fiable, des outils efficaces, et une documentation irréprochable qui permet de démontrer, preuve à l’appui, l’efficacité du dispositif.

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