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Le défi des Personnes Politiquement Exposées (PPE)

L’origine du concept de PPE

En novembre 1993, le général Sani Abacha prenait le pouvoir au Nigeria, pays qu’il dirigea d’une main de fer pendant une grande partie de la décennie. Pendant son mandat, il a pu exploiter sa position de force pour piller les coffres du pays et blanchir des fonds en Europe dans le cadre d’un hold-up dont l’ampleur et l’ambition criminelles n’avaient jamais atteint un tel niveau.

Pendant son mandat, entre 3 et 4 milliards de dollars ont été volés à la Banque centrale nigériane et blanchis à l’étranger. Comme les représentants du général l’ont plus tard expliqué, ces opérations ont eu lieu pour diverses « raisons d’état et en lien avec la sécurité » opaques.

Au total, ce sont 750 millions de dollars qui ont été versés sur des comptes bancaires nigérians, puis transférés vers divers comptes bancaires européens appartenant à Abacha et à ses associés. De plus, une société dont le général Abacha et ses associés avait la propriété a acheté des lettres de change qui ont été garanties par la Banque centrale nigériane, puis rachetées par le ministère nigérian des finances sur les instructions d’Abacha dans le cadre d’une transaction qui a octroyé aux bénéficiaires un gain d’environ 500 millions de Deutsche Mark. Dans le cadre de ce vol, une entreprise anglaise appartenant à des relations d’Abacha a vendu des vaccins à un programme de soutien aux familles nigérianes, un programme géré en dernier ressort par la femme du général Abacha, avec un profit présumé d’environ 80 millions de dollars. Les fonds blanchis ont ensuite été déposés sur des comptes bancaires à l’étranger situés en Suisse, au Royaume-Uni, en France, au Luxembourg, au Liechtenstein et dans d’autres juridictions, tous contrôlés par Abacha, sa famille et ses proches associés.

Après la mort du général en 1998, le nouveau gouvernement nigérian a déployé des efforts acharnés pour récupérer les fonds volés et, en 2001, a commencé à déposer des plaintes auprès de plusieurs autorités européennes, dont l’Office fédéral de la police suisse. En réponse, les autorités suisses ont lancé une série d’enquêtes d’envergure auprès de dizaines de banques suisses, ce qui a finalement permis de restituer au Nigeria une partie de l’argent, mais certainement pas la totalité.

C’est dans le contexte de cette enquête internationale de haut vol et très médiatisée sur le rapatriement de l’argent volé par Abacha que le concept de personnes politiquement exposées (PPE) a pris de l’ampleur, les PPE étant à distinguer des criminels et des terroristes (même si les personnes politiquement exposées peuvent en être aussi) et leur lien avec du blanchiment d’argent et d’autres infractions financières.

Bien entendu, Abacha a pas été le seul ces dernières années à profiter d’une position et d’un rôle politiques pour participer à de la corruption, des pots-de-vin et, en fin de compte, à du blanchiment d’argent. Muhammar Kadhafi et Augusto Pinochet, pour ne citer que quelques dirigeants au plus haut niveau, ont également profité de fonctions et de relations politiques pour s’enrichir et enrichir leur entourage.

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En 2003, la Convention des Nations Unies contre la corruption (CNUCC), même si elle n’utilise pas directement l’expression de « personnes politiquement exposées », a souligné la sensibilité particulière des fonctionnaires publics et étrangers occupant des fonctions législatives, exécutives, administratives ou judiciaires à des risques de corruption et de détournement de fonds, de blanchiment d’argent, d’appropriation frauduleuse, de trafic d’influence, d’abus de fonctions, de dissimulation et d’entrave à la justice. L’article 20 de la CNUCC, qui traite de l’enrichissement illicite, attribue un comportement criminel aux personnes dont les avoirs ne peuvent être expliqués par rapport à leurs revenus légitimes. Quant à l’article 52, il invite les États parties à prendre des mesures, entre autres, pour renforcer le contrôle « des comptes ouverts ou tenus par des personnes qui exercent ou ont exercé des fonctions publiques importantes, ainsi que par des membres de leur famille et des proches. »

Ce contrôle renforcé vise à détecter les transactions suspectes, en particulier la corruption, et à rapporter ces soupçons aux autorités compétentes. Cependant, il a été souligné que cette surveillance ne devait pas être interprétée comme une manœuvre destinée à décourager les établissements financiers, ou à leur interdire, de faire des affaires avec un quelconque client légitime.

Parallèlement, en 2003, le Groupe Wolfsberg, un ensemble de banques mondiales engagées dans la lutte contre la criminalité financière, a publié des recommandations (mises à jour depuis) sur la manière de traiter les personnes politiquement exposées. Comme pour la CNUCC, le Groupe Wolfsberg insiste sur la détection de la « grande corruption », que Transparency International définit comme « 1des actes commis à un niveau élevé du gouvernement et qui faussent les politiques ou le fonctionnement central de l’État et permettent aux dirigeants d’en tirer profit au détriment du bien public ». D’autres cas de corruption, notamment dans le secteur privé, doivent être identifiés grâce à une approche fondée sur le risque de l’établissement financier, en particulier lors de l’intégration du client et via l’obligation de vigilance à l’égard de la clientèle, ainsi que plus tard au moyen d’un suivi continu de la relation du client avec l’établissement.

Toutefois, la notion de PPE et les mesures que les établissements financiers doivent prendre pour lutter contre la menace financière que représentent ces personnes, comme bien d’autres dans le domaine de la lutte contre le blanchiment d’argent et le terrorisme, ont fait l’objet d’une définition la plus exhaustive possible dans les recommandations du GAFI. Le GAFI a abordé le sujet pour la première fois en juin 2003 dans le cadre de ses 40 recommandations. L’accent était alors mis sur les PPE étrangères, les membres de leur famille et leurs proches collaborateurs. En février 2012, le GAFI a cherché à aligner son approche sur celle de la CNUCC et a commencé à ajouter à son champ d’action les PPE nationales et les PPE liées à des organisations internationales, même si l’objectif du GAFI a été dès le départ plus large que celui de la CNUCC en matière de lutte contre la corruption, notamment pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

Les recommandations du GAFI concernant les personnes politiquement exposées (recommandations 12 et 22) ont été publiées en juin 2013 et, bien qu’elles soient essentiellement non contraignantes, constituent une base solide pour les initiatives nationales et institutionnelles cherchant à lutter contre le risque que ces personnes exploitent leur position à des fins d’enrichissement personnel. Provenant du monde entier, ces recommandations constituent le fondement des efforts de chaque pays en matière d’identification et de réponse aux PPE. Et même si ces approches varient forcément d’une nation à l’autre, les éléments-clés de chaque stratégie se ressemblent d’une juridiction à l’autre.

Qu’est-ce qu’une PPE ?

Selon le GAFI, une PPE est une personne qui est ou a été chargée d’une fonction publique importante et autre qu’un fonctionnaire de rang moyen ou subalterne. L’une des conséquences de sa fonction et de son influence est l’émergence de risques financiers spécifiques dans la mesure où cette personne peut potentiellement agir de manière à abuser de sa situation pour commettre des crimes de blanchiment de capitaux et des infractions sous-jacentes connexes, dont la corruption, les pots-de-vin et le financement du terrorisme. Les établissements financiers et non financiers ainsi que diverses professions sont donc tenues de prendre des mesures spécifiques pour détecter ce type d’abus du système financier lorsqu’il se produit.

Plus spécifiquement, les recommandations du GAFI exigent des pays qu’ils adoptent une législation obligeant les établissements à adopter des mesures allant au-delà des obligations classiques de vigilance à l’égard de la clientèle dans le but de déterminer si l’établissement, financier ou non, travaille avec cette PPE et le niveau de risque que posent ces transactions. Des mesures visant à protéger l’établissement contre de telles menaces peuvent devoir être adoptées. Dans certaines circonstances, il peut s’avérer nécessaire d’informer les autorités compétentes.

Dans la pratique, le respect de ces exigences d’identification des PPE s’est avéré un défi à la fois très difficile, fastidieux et coûteux pour les autorités publiques ainsi que pour les établissements financiers et non financiers. Cette situation s’explique par un certain nombre de raisons, notamment :

  • l’absence d’une définition globale et unique d’une PPE
  • des définitions qui font l’objet d’une interprétation très large
  • une définition des PPE élargie pour inclure les membres de la famille et les proches, termes qui sont eux-mêmes empreints d’une certaine ambiguïté
  • le nombre impressionnant de personnes susceptibles de correspondre à ces définitions
  • les limites des bases de données traditionnelles pour intégrer toutes les PPE potentielles
  • la capacité d’une base de données à ingérer et traiter les mises à jour, d’autant plus que le pouvoir change constamment de mains
  • la difficulté de trouver des points de données secondaires pour faciliter l’identification des PPE
  • la mesure dans laquelle une personne ayant quitté son poste est toujours considérée comme une PPE

Quelles fonctions sont vraiment prises en compte lors de la définition des PPE ? Prenez, par exemple, la liste fournie à la section 35 (14) de la réglementation britannique de 2017 sur le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et le transfert de fonds (informations sur le payeur), qui identifie les PPE appartenant à ces catégories :

(a) chef d’État, chef de gouvernement, ministres et ministres adjoints

(b) membres du Parlement ou d’organes législatifs similaires

(c) membres d’un organe directeur d’un parti politique

(d) membres d’une Cour suprême ou constitutionnelle ou de tout organe judiciaire dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours, sauf circonstances exceptionnelles

(e) membres d’une Cour des comptes ou du Conseil d’une banque centrale

(f) ambassadeurs, chargés d’affaires et officiers supérieurs des forces armées

(g) membres d’un organe d’administration, de direction ou de surveillance d’une entreprise publique

(h) directeurs, directeurs adjoints et membres du Conseil d’administration ou une fonction équivalente dans une organisation internationale

Il s’agit là d’une liste standard de fonctions traditionnellement occupées par les PPE. Cependant, il faut s’attendre à ce que tous les établissements financiers ou non financiers n’utilisent pas exactement les mêmes cadres pour classer ou gérer les relations PPE. En effet, ces catégorisations seront fonction, entre autres, des services offerts et des juridictions où l’établissement opère. Dans tous les cas, selon la juridiction concernée, les exigences réglementaires locales peuvent nécessiter une définition des PPE plus large que celle décrite ci-dessus.

Qui plus est, il existe encore des zones d’ambiguïté. Ainsi, la définition d’une entreprise d’État peut varier d’une juridiction à l’autre et peut même être laissé à l’appréciation de l’établissement financier. Dans cette optique, le terme d’« entreprise publique » désigne-t-il uniquement les entreprises dans lesquelles le gouvernement détient une participation majoritaire au niveau national ou cela s’applique-t-il aussi au niveau régional ou local ?

La définition d’un poste de haut niveau au sein de l’Armée ou le classement d’une structure comme une organisation internationale sont d’autres exemples. Même lorsque la définition est la même, son application pratique à des fins d’intégration des clients et de supervision continue peut différer sensiblement.

C’est ainsi que l’Autorité de bonne conduite financière britannique (FCA), qui exerce une surveillance réglementaire de la lutte contre le blanchiment d’argent dans une grande partie du secteur financier du pays, souligne que la définition d’une « fonction publique d’envergure » variera selon la nature de la fonction exercée par une personne. La FCA compte donc sur les entreprises « pour comprendre la nature du poste occupé et si la fonction donne lieu à un risque d’abus de position à grande échelle ». Si un poste est occupé par une personne dans une juridiction considérée comme présentant moins de risque de corruption à grande échelle, alors seules les personnes disposant d’un véritable pouvoir exécutif doivent être considérées comme occupant une fonction publique importante. Il n’est pas du tout évident de savoir si des établissements financiers implantés au Royaume-Uni, ou des établissements opérant à l’extérieur du pays, s’appuieront sur la même interprétation et donc sur les mêmes normes en matière d’obligations de vigilance.

Le fait qu’un haut niveau d’analyse subjective soit inévitablement associé à l’analyse d’une PPE se reflète également dans les interprétations faites pour savoir qui n’est pas une PPE. Comme précisé ci-dessus, le GAFI exclut de la définition d’une PPE les personnes de rang inférieur ou intermédiaire. Pourtant, le Canada a décidé d’inclure tous les maires canadiens, quelle que soit la taille de leur localité, dans sa définition d’une PPE.

En outre, comme le souligne à nouveau l’autorité de bonne conduite financière britannique, « un établissement doit être conscient de la possibilité que des fonctionnaires de rang moyen ou inférieur agissent pour le compte d’une PPE lors de l’évaluation du risque global que pourrait présenter un client. Lorsqu’il estime qu’il peut y avoir un risque, l’établissement doit envisager les mesures supplémentaires à prendre ». Cela implique un niveau de connaissance locale pointu et une analyse chronophage qui font souvent défaut.

Le Groupe Wolfsberg attribue certainement à l’absence d’une définition acceptée de ce qui constitue une PPE et à l’existence de différences régionales et locales dans les interprétations la moindre efficacité du filtrage des PPE et de l’application d’une approche fondée sur le risque.

Les appels à la normalisation des approches concernant les PPE visaient à résoudre les problèmes de classement et d’interprétation. C’est ainsi que le Groupe de Wolfsberg a recommandé au GAFI d’encourager ses membres à créer des listes de fonctions politiques de haut niveau ou de titulaires de postes publics en expliquant que cela permettrait aux établissements financiers de consacrer leurs ressources limitées à des scénarios présentant des risques élevés. Si bien que la cinquième Directive anti-blanchiment exige des États membres de l’Union européenne qu’ils dressent une liste fonctionnelle de PPE indiquant les postes considérés comme politiquement exposés, mais sans les noms des personnes exerçant ces fonctions. La Commission européenne a également l’intention de créer une liste unique des fonctions publiques importantes qu’elle rendra publique. Ces listes fonctionnelles aideront non seulement les équipes de conformité plus petites à identifier les vulnérabilités liées aux PPE, mais elles pourraient aussi contribuer à normaliser les approches de ce problème.

En France, l’’encadrement de la notion et l’application des obligations de vigilance relatives aux personnes qualifiées par la réglementation européenne comme étant politiquement exposées (PPE) ont été introduits dans le Code monétaire et financier lors de la transposition de la troisième directive européenne 2005/60 du 26 octobre 2005 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.

La 4ème directive anti-blanchiment et les dispositions du 2° de l’article L. 561-10 du code monétaire et financier définissent quant à eux, de manière générique, les PPE comme étant des personnes qui sont considérées comme exposées à des « risques plus élevés » de blanchiment de capitaux, notamment de corruption et de trafic d’influence, en raison des fonctions politiques, juridictionnelles ou administratives qu’elles exercent ou ont cessé d’exercer depuis moins d’un an pour le compte d’un État ou d’une institution internationale publique créée par un traité. Cette même directive a étendu le champ des obligations aux PPE nationales, bien que d’autres pays ne les prennent pas en compte.

Cette extension du champ des obligations a notamment eu pour conséquence auprès de la cellule de renseignement financière française dite TRACFIN, de traiter des signalements sur une plus grande variété de typologies d’atteintes à la probité au niveau national (trafic d’influence, prise illégale d’intérêts, favoritisme).

Ainsi, dans son dernier rapport publié en juin 2021, TRACFIN indique qu’en s’appuyant sur ses pouvoirs d’investigation et d’externalisation renforcés qu’elle a transmis, en 2020, à l’autorité judiciaire ou aux services d’enquête judiciaire, 31 dossiers portant sur une présomption d’atteinte à la probité. Les soupçons portaient essentiellement sur des faits de corruption (46%), de blanchiment du produit de la corruption (24,5%) et de détournement de fonds ou de biens publics (19%). Dans une moindre mesure, les signalements portent sur une prise illégale d’intérêt ou du favoritisme (6,5%) et du trafic d’influence (4%).

D’après TRACFIN, l’analyse de ces dossiers met en exergue une distinction entre, d’une part, les dossiers présentant un volet international, caractérisé par le blanchiment en France du produit de la corruption ou du détournement de fonds commis à l’étranger et la corruption d’agents publics étrangers et, d’autre part, les dossiers présentant des enjeux nationaux, marqués par l’exposition des personnes politiquement exposées (PPE) aux risques de favoritisme, prise illégale d’intérêt, trafic d’influence et détournement de fonds.

Les fonctions politiques, juridictionnelles ou administratives susmentionnées que peuvent occuper une PPE sont ainsi limitativement énumérées au I de l’article R. 561-18. Article R. 561-18 I du Code monétaire et financier :

– Pour l’application du 2° de l’article L. 561-10, une personne exposée à des risques particuliers en raison de ses fonctions est une personne qui exerce ou a cessé d’exercer depuis moins d’un an l’une des fonctions suivantes :

  • 1° Chef d’Etat, chef de gouvernement, membre d’un gouvernement national ou de la Commission européenne ;
  • 2° Membre d’une assemblée parlementaire nationale ou du Parlement européen, membre de l’organe dirigeant d’un parti ou groupement politique soumis aux dispositions de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 ou d’un parti ou groupement politique étranger ;
  • 3° Membre d’une cour suprême, d’une cour constitutionnelle ou d’une autre haute juridiction dont les décisions ne sont pas, sauf circonstances exceptionnelles, susceptibles de recours ;
  • 4° Membre d’une cour des comptes ;
  • 5° Dirigeant ou membre de l’organe de direction d’une banque centrale ;
  • 6° Ambassadeur ou chargé d’affaires ;
  • 7° Officier général ou officier supérieur assurant le commandement d’une armée ;
  • 8° Membre d’un organe d’administration, de direction ou de surveillance d’une entreprise publique ;
  • 9° Directeur, directeur adjoint, membres du conseil d’une organisation internationale créée par un traité, ou une personne qui occupe une position équivalente en son sein.

L’AMF (Autorité des marchés financiers) précise dans ses lignes directrices sur la notion de PPE que, la qualification de PPE répond à des conditions strictes et les assujettis ne peuvent qualifier comme telle ou appliquer les mesures de vigilance complémentaires prévues à l’article R. 561-20-2 à des personnes non-PPE. Toutefois, les assujettis peuvent classer en risque élevé des personnes qui ne répondent pas à la définition de PPE, soit parce qu’elles exercent une fonction politique, juridictionnelle ou administrative non visée ici, soit parce qu’elles ont un lien de parenté non visé au II, mais qui sont exposées à un risque jugé comparable à celui d’une PPE. Dans ces cas de risque jugé plus élevé par l’assujetti, ce dernier peut être amené à renforcer, sur le fondement de l’article L. 561-10-1, l’intensité des mesures de vigilance à l’égard de ces personnes.

De plus, de façon générale, le respect de ces exigences d’identification des PPE est également un défi financier et matériel puisqu’il n’existe pas à ce jour de liste officielle et exhaustive de PPE. Cependant, en fonction de la taille de l’assujetti, l’ACPR recommande fortement de se doter d’outil automatisé intégrant les listes de PPE éditées et fournies par des prestataires externes, tout en s’assurant que ces dernières soient “à jour”.

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Membres de la famille et proches collaborateurs des PPE

Le fait que le groupe de cibles potentielles à prendre en compte pour les phases d’intégration et de supervision continue soit plus vaste que le groupe de PPE déjà important et immédiatement ciblé pose un problème majeur pour l’identification et le traitement des PPE. En effet, l’obligation de vigilance doit ici tenir compte d’un éventail bien plus large de personnes, notamment les membres de la famille de la PPE et leurs proches associés.

Et, bien entendu, les membres de la famille ou les proches associés des PPE peuvent être les bénéficiaires des opérations criminelles. Les PPE peuvent aussi utiliser ces groupes de personnes pour dissimuler leurs fonds ou leurs actifs d’origine criminelle. Les recommandations du GAFI exigent que les membres de la famille et les proches associés soient considérés comme des PPE. En effet, il existe un risque que ces personnes profitent de leur relation avec la PPE cliente de l’établissement pour faire migrer les produits du crime ou favoriser le placement et le déguisement de biens, y compris à des fins terroristes.

Se concentrer sur ces personnes élargit de manière exponentielle la catégorie des personnes qui doivent faire l’objet d’une obligation de vigilance et pose des défis importants en matière de définition.

Le GAFI admet que l’étendue des termes « membres de la famille » et « proches associés ou collaborateurs » dépend dans une certaine mesure des structures socio-économiques et culturelles au sein de la juridiction de la PPE. Le groupe GAFI note que « l’identification de ces personnes est également difficile car le nombre de personnes définies comme membres de la famille et proches associés est fluctuant et peut évoluer sensiblement au fil du temps. » Il est suggéré que les autorités nationales fournissent aux établissements financiers et autres des définitions ou des exemples fonctionnels pertinents. Néanmoins, « ces définitions et exemples fonctionnels ne devraient pas être interprétés de manière trop étroite ou trop large ». Plutôt que de résoudre le problème, une telle approche peut tout simplement le rendre plus aigu.

En effet, dans certaines catégorisations nationales, la famille proche comprendra par exemple les membres de la famille directe d’une PPE, à savoir le conjoint ou le partenaire civil, les enfants et les parents de cette personne. En même temps, les établissements sont tenus d’adopter une approche proportionnée et fondée sur le risque à l’égard des membres de la famille qui n’entrent pas dans cette définition. Lorsqu’une PPE est considérée comme présentant un risque plus élevé, il conviendra d’élargir le cercle des membres de la famille.

En france, la qualité de PPE couvre également les proches, en particulier les membres directs de la famille des PPE tels que limitativement définis au II de l’article R. 561-18 :

II. – Sont considérées comme des personnes connues pour être des membres directs de la famille des personnes mentionnées au I:

1° Le conjoint ou le concubin notoire ;

2° Le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou par un contrat de partenariat enregistré en vertu d’une loi étrangère ;

3° Les enfants, ainsi que leur conjoint, leur partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou par un contrat de partenariat enregistré en vertu d’une loi étrangère ;

4° Les ascendants au premier degré.

Par exemple, sont concernés les gendres et belles-filles des PPE, quelle que soit la nature de l’alliance.

Quant aux proches collaborateurs connus, ils présentent des problèmes de définition potentiellement encore plus aigus. L’approche du GAFI est extrêmement large en la matière. En effet, les proches associés comprennent ici les partenaires [sexuels] [connus] en dehors de l’unité familiale ; les membres éminents du même parti politique, de la même organisation civile et du même syndicat que celui de la PPE ; les partenaires commerciaux ou associés, en particulier ceux qui partagent la propriété [effective] des entités juridiques avec la PPE ou qui sont liés d’une autre manière. La réglementation britannique sur le blanchiment de capitaux, par exemple, a une approche plus technique et identifie les proches associés comme étant (i) des personnes connues pour avoir la propriété effective conjointe d’une entité juridique ou d’une construction juridique ou toute autre relation d’affaires étroite avec une PPE ; ou (ii) une personne physique ayant la propriété effective exclusive d’une entité juridique ou d’une construction juridique dont on sait qu’elle a été créée au profit d’une PPE.

Cependant en France, il convient de préciser que la notion de “collaborateur proche” est relativement bien encadrée. En effet, sont considérées comme des proches, les personnes étroitement associées à des PPE selon les trois situations décrites au III de l’article R. 561-18 du CMF :

III. – Sont considérées comme des personnes étroitement associées aux personnes mentionnées au I :

1° Les personnes physiques qui, conjointement avec la personne mentionnée au I, sont bénéficiaires effectifs d’une personne morale, d’un placement collectif, d’une fiducie ou d’un dispositif juridique comparable de droit étranger ;

2° Les personnes physiques qui sont les seuls bénéficiaires effectifs d’une personne morale, d’un placement collectif, d’une fiducie ou d’un dispositif juridique comparable de droit étranger connu pour avoir été établi au profit de la personne mentionnée au I ; 3° Toute personne physique connue comme entretenant des liens d’affaires étroits avec la personne mentionnée au I.

3° Toute personne physique connue comme entretenant des liens d’affaires étroits avec la personne mentionnée au I.

Selon les lignes directrices[1] de l’ACPR relatives aux personnes politiquement exposées publiées en 2018, la troisième situation, qui consiste pour une personne physique à être connue pour entretenir un lien d’affaires étroit avec une personne exerçant ou ayant exercé depuis moins d’un an l’une des fonctions énumérées au I de l’article R. 561-18, implique que les trois conditions suivantes soient réunies :

– La présence d’un lien d’affaires : le lien est en principe de nature commerciale, mais peut recouvrir également des intérêts économiques de nature civile. Il peut s’agir d’intérêts économiques communs ou plus largement, d’intérêts susceptibles d’avoir une influence sur la situation financière ou économique de chacune de ces personnes. À ce titre, le caractère onéreux de la prestation rendue ou des fonctions exercées par la personne physique, proche de la PPE, est susceptible de constituer un indice, si ce n’est une présomption de l’existence d’un lien d’affaires.

– Le lien est étroit : ce caractère peut tenir soit à la régularité des interventions de la personne physique proche de la PPE, soit à l’importance de son action sur les affaires de la PPE. Les liens avec la PPE devraient être considérés comme étroits s’ils ont un impact financier conséquent sur le montant de ses revenus. S’agissant des personnes qui représenteraient les intérêts économiques ou financiers d’une PPE, cette proximité pourrait notamment ressortir du nombre important d’actions effectuées au nom et pour le compte de cette dernière ou, dans le cadre d’une opération unique, de l’importance de cette opération rapportée à sa surface financière.

– Le lien est connu par l’organisme financier, que cette information soit publique ou notoire ou manifeste. Peuvent notamment être concernées les personnes physiques :

  • assurant, contre rémunération, la représentation permanente d’une PPE ;
  • ayant conclu un ou plusieurs contrats de nature commerciale ou non (client, fournisseur, prestataire de services, garant, prêteur etc.) avec une PPE ou avec une entreprise dont la PPE est bénéficiaire effectif. Les organismes financiers précisent dans leurs procédures internes LCB-FT les différentes situations de liens d’affaires étroits avec une PPE qui peuvent se rencontrer.

Ces précisions concernant la notion de PPE rivalisent forcément avec la définition d’autres autorités telles que le GAFI, ou que d’autres pays, et viennent s’ajouter à une multitude de possibilités.

Les difficultés pour identifier ces groupes sont bien plus importantes que pour les PPE car leur exposition politique peut ne pas être facilement visible. Et naturellement, les informations pertinentes sur l’identité de ces personnes peuvent, du moins dans une certaine mesure, dépendre du client (la PPE) lui-même. Les informations dont dispose l’établissement financier peuvent varier sensiblement en fonction du service qu’il fournit. Dans le cadre de la banque privée, les informations pertinentes peuvent être plus facilement accessibles que pour des transactions de détail d’ordre général.

Pour déterminer si une personne est un proche associé connu d’une PPE, les recommandations du GAFI précisent que les banques doivent uniquement tenir compte des informations en leur possession ainsi que des informations crédibles et accessibles publiquement. Il est donc essentiel d’avoir accès à une bonne base de données.

Les PPE et le risque

L’identification des PPE a pour but de déterminer à la fois le niveau de risque pour un établissement et les mesures à prendre pour le protéger contre la menace que représente le comportement criminel d’une PPE cliente, du bénéficiaire effectif final qui est une PPE ou de la famille ou des proches associés de cette même PPE. Il est donc important de reconnaître que toutes les PPE ne constituent pas une menace aussi élevée.

Hiérarchies des PPE : dans la réalité, il existe tout un éventail de PPE, depuis celles exerçant un contrôle important sur les ressources et les actifs d’un pays spécifique et qui peuvent présenter le risque le plus élevé pour l’établissement financier jusqu’à celles se situant juste au-dessus de fonctionnaires de rang inférieur ou intermédiaire. Du coup, certains modèles de catégorisation établissent une distinction entre, d’une part, les fonctions véritablement éminentes telles celles de chef d’État, de ministre, de haut magistrat, de haut fonctionnaire, de cadres et de dirigeant d’un parti politique d’envergure (et présentant le risque le plus élevé) et, d’autre part, un ensemble de fonctions susceptibles d’entrer dans la définition mais pouvant aussi en être exclues selon le niveau de corruption au sein d’une juridiction spécifique. Ce dernier groupe peut par exemple comprendre les maires de grandes villes, les préfets, les députés ainsi que les dirigeants d’organismes supranationaux. Au final, c’est une approche fondée sur le risque qui devrait permettre de déterminer où se trouve un individu particulier sur le spectre des PPE ainsi que le niveau de risque pour l’établissement financier.

Les PPE étrangères et nationales : les approches pour identifier et gérer les PPE varient souvent selon qu’il s’agit de PPE étrangères ou nationales. L’idée prédominante est que les PPE étrangères sont plus dangereuses que les PPE nationales, notamment parce qu’un établissement peut ne pas avoir une parfaite connaissance du profil d’une PPE étrangère. Le GAFI reconnaît qu’« il est extrêmement difficile pour les établissements financiers et [non financiers] de déterminer quels clients doivent être considérés comme des PPE dans un pays étranger ». Les risques les plus importants sont lorsqu’une PPE cherche à établir une relation avec un établissement financier en dehors de sa juridiction d’origine et sans aucune explication claire ou justification commerciale. Concernant les PPE nationales, elles posent généralement moins de risques que la catégorie étrangère, surtout pour les établissements financiers de moindre envergure et donc peu exposés aux marchés financiers étrangers. À noter aussi que certaines juridictions n’ont pas l’obligation de faire des recherches sur des PPE nationales. Dans un certain nombre de pays, ce manque d’intérêt est souvent motivé par des pressions politiques où une analyse interne trop poussée, plus particulièrement dans le cadre des affaires financières, est résolument mal vue. Quant au Groupe Wolfsberg, il affirme que les établissements financiers devraient évaluer le risque que représentent les PPE, qu’elles soient étrangères ou nationales, et appliquer des normes d’obligation de vigilance appropriées.

Gérer le niveau de risque lié aux PPE

En plus d’identifier une PPE, un établissement devra déterminer le niveau de risque que cette personne représente. Les menaces liées à une PPE à haut risque imposeront une obligation de vigilance accrue. Pour répondre à des menaces de faible niveau, une obligation de vigilance simplifiée peut suffire.

Les établissements devront mettre en place des systèmes de gestion des risques pertinents ainsi que des mesures proactives pour déterminer si un client ou le bénéficiaire effectif d’un client est une PPE étrangère. Un tel système sera tributaire, entre autres, de la nature des activités de l’établissement, du profil de ses clients et des transactions escomptées.

En effet, dans la mesure où les PPE étrangères sont, dans la plupart des cas, considérées comme une source de risques élevés, l’établissement devra donc appliquer des mesures d’obligation de vigilance renforcée, c’est-à-dire des mesures similaires à celles requises dans d’autres situations à haut risque, qui vont au-delà de l’obligation normale de vigilance à l’égard de la clientèle. La décision de l’établissement d’intégrer un client à haut risque ou de poursuivre la relation d’affaires avec ce type de PPE doit également être prise au niveau de la direction générale qui aura été informée du dossier au préalable.

Cette obligation de vigilance accrue implique notamment l’acquisition d’informations supplémentaires sur la PPE étrangère, l’obtention d’informations plus poussées sur la relation d’affaires envisagée et les raisons qui motivent les transactions concernées, l’obtention d’informations sur l’origine des fonds et l’origine de la richesse de la PPE ainsi qu’une supervision accrue de la relation d’affaires, y compris le renforcement à la fois de la périodicité et du nombre de contrôles ainsi que des efforts entrepris pour identifier les transactions qui nécessitent une enquête plus approfondie. La décision d’intégrer ce type de client doit, comme évoquée ci-dessus, être remontée à un niveau supérieur et être prise par la Direction générale. Une telle remontée sera également nécessaire lorsqu’il faut prendre la décision de poursuivre ou non les activités avec un client existant qui est ou devient une PPE.

Concernant les PPE nationales et les PPE appartenant à des organisations internationales, l’approche est d’emblée plus souple. Selon le GAFI, les établissements sont tenus de prendre des mesures raisonnables pour déterminer si un client ou un bénéficiaire effectif correspond bien à ce profil de PPE. Une évaluation des risques d’entrer en relation d’affaires avec la PPE devra être conduite. Cette évaluation déterminera si la relation d’affaires de l’établissement avec la PPE présente un risque faible ou élevé. L’évaluation tiendra compte des facteurs de risques liés au client et au pays ainsi que des risques liés à une transaction de produits et ou de service ou liés à un canal de distribution spécifique. À cette analyse devra s’ajouter une évaluation de la nature de la fonction politique exercée par la PPE et notamment le niveau d’ancienneté de la PPE et son accès à des fonds publics. Si le risque est faible, autant éviter de renforcer l’obligation de vigilance. Dans le cas contraire, il convient de reproduire l’approche adoptée pour les PPE étrangères et d’exercer une obligation de vigilance accrue à l’égard de la PPE appartenant à l’organisation nationale ou internationale.

Dans tous les cas, il faut envisager que même si une relation d’affaires est considérée au départ comme présentant un faible risque, elle peut, au fil du temps, se transformer en une relation à haut risque. Par conséquent, une surveillance continue est indispensable pour maintenir ou décider de poursuivre une relation avec une PPE.

Le GAFI insiste donc sur le fait que les établissements « devraient avoir l’assurance, sur la base de mesures raisonnables, que la PPE de l’organisation nationale/internationale n’est pas un client à risque élevé, que ce soit lors de l’ouverture du compte ou plus tard ». Dans la pratique cependant, nombre d’établissements ne font pas de distinction entre les PPE nationales et étrangères, que ce soit au moment de l’intégration du client ou dans le cadre de la supervision continue. Un seul processus d’intégration doit valoir pour tous les types de clients.

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Et lorsque les établissements soupçonnent, ou ont des raisons valables de soupçonner, que les fonds qu’on leur demande de traiter sont d’origine criminelle, ils pourront faire une déclaration de transaction suspecte aux autorités compétentes.

La détection d’une PPE à l’entrée ou pendant la relation d’affaires, emporte l’application de trois mesures complémentaires bien précises en France :

  • l’obligation de confier à un membre de l’organe exécutif ou toute personne habilitée à cet effet par l’organe exécutif la prise de décision de nouer ou maintenir une relation d’affaires avec un client PPE ou un client dont le bénéficiaire effectif est une PPE
  • l’obligation de rechercher l’origine du patrimoine et des fonds impliqués dans la relation d’affaires ou la transaction avec un client PPE ou un client dont le bénéficiaire effectif est une PPE
  • la surveillance renforcée de la relation d‘affaires

Dans les faits, l’application de la deuxième mesure consiste le plus souvent pour les assujettis à connaître l’origine et les montants des fonds qui ont pu être utilisés au bénéfice du client lorsque ce dernier est une personne morale (apport en capital…). Même si les autorités préconisent de recueillir des éléments d’information sur la source des revenus de la PPE et une estimation de son patrimoine, et à toute autre information utile de connaissance client, les assujettis se heurtent au risque de complexification de la relation d’affaires avec le client qui peut ne pas souhaiter transmettre autant de détails sur sa situation financière voire rompre la relation d’affaires.

Il existe cependant des dérogations à l’application des mesures de vigilance complémentaires :

Selon les lignes directrices de l’ACPR et conformément aux dispositions du 6ème alinéa de l’article L. 561-10 du CMF, les organismes financiers peuvent dans certains cas, ne pas appliquer les mesures de vigilance complémentaires spécifiques aux PPE.

Notamment lorsque les deux conditions cumulatives ci-dessous sont remplies :

  • Il n’existe pas de soupçon de BC-FT ;
  • et la relation d’affaires est établie :

i) soit, avec une personne présentant un faible risque, définie à l’article R. 561-15 (dans ces hypothèses, la PPE est un bénéficiaire effectif de cette personne) :

  • société dont les titres sont admis à la négociation sur un marché réglementé ;
  • organisme financier ;
  • organisme public ayant une activité économique, industrielle ou commerciale répondant aux critères de transparence et de contrôle définis à l’article R. 561-1524.

ii) soit, pour un ou plusieurs produits présentant un faible risque de BC-FT tel que défini à l’article R. 561-16 (par exemple, un crédit à la consommation inférieur à 1000 euros ou un contrat d’assurance habitation, ou les contrats collectifs obligatoires en santé et en prévoyance).

De même, il ressort des dispositions de l’article L. 561-9-1 que les mesures de vigilance complémentaires spécifiques aux PPE ne trouvent pas à s’appliquer lorsque la relation d’affaires porte sur l’émission et la gestion de monnaie électronique dite « anonyme », qui répond aux conditions précisées à l’article R. 561-16-1 du CMF.

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L’encadrement de la notion de PPE via les élus locaux par TRACFIN (FIU française) :

TRACFIN exerce une vigilance accrue au-delà l’encadrement légal de la notion, notamment sur les personnes exerçant un mandat local, les décisionnaires publics, les dirigeants de sociétés d’économie mixte ou membres d’organes exécutifs de collectivités territoriales. D’après ma cellule, la mise en œuvre de cette vigilance s’appuie notamment sur les travaux de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, dite HATVP et le recensement des représentants d’intérêts.

Ainsi dans son rapport, la cellule indique qu’à compter du 1er juillet 2022, le champ du répertoire des représentants d’intérêts sera étendu à certaines fonctions exécutives au sein de collectivités territoriales et d’autres agents publics comme certains chefs de services et sous-directeurs au sein des administrations centrales.

Il est à noter qu’une coopération approfondie existe entre TRACFIN et la HATVP, traduite notamment par une efficacité de la transmission de notes d’informations sur des soupçons d’atteintes à la probité ou de manquements à l’obligation déclarative de responsables publics relevant du champ de compétence de la Haute Autorité. Ces dossiers mettent donc en évidence des secteurs particulièrement exposés tels que les bâtiments et travaux publics, les transports, l’environnement et la gestion des déchets ou de l’eau.

Enfin, TRACFIN observe également des cas de manquement à la déontologie d’agents publics en fonction.

Néanmoins, le traitement des atteintes à la probité à l’échelle internationale implique, par définition, d’assurer la traçabilité des flux financiers transnationaux.

Il faut d’ailleurs venir noter que l’activité des services comme TRACFIN dépend également de l’effectivité du dispositif applicable aux PPE, qui constitue un enjeu central en matière de lutte contre le blanchiment de la corruption internationale. Cette effectivité contribue à l’orientation des capteurs de la cellule de renseignement en indiquant de manière précise aux déclarants (les assujettis) les catégories de personnes concernées par la mise en œuvre de mesures complémentaires prévues à l’article R. 561-20-2 du CMF.

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Signaux d’alerte et risques

Ce n’est pas parce qu’un client est identifié en tant que PPE qu’il ne peut pas être intégré ou que des efforts ne peuvent pas être entrepris pour l’intégrer. Il suffit d’identifier et de quantifier les risques réels afin que l’établissement puisse prendre les mesures nécessaires pour se protéger dans le cadre d’une quelconque relation avec une PPE.

Quelques indicateurs comme quoi une PPE peut présenter un risque moindre :

  • Facteurs géographiques – La PPE évolue dans une juridiction ayant un niveau de corruption faible, des institutions étatiques fortes, des registres clients bien développés, des dossiers d’enquêtes sur la corruption politique solides, un système judiciaire indépendant, une presse libre, un système politique stable et des élections équitables.
  • Facteurs liés aux produits – La PPE souhaite accéder à un produit ou à un service pour lequel l’établissement a évalué un faible risque de blanchiment d’argent.
  • Facteurs personnels – Une PPE peut ne présenter qu’un faible risque lorsqu’elle est soumise à des exigences de divulgation rigoureuses ou qu’elle n’a pas de responsabilités exécutives, comme par exemple un député dans l’opposition.

Dans ce cas, une obligation de vigilance simplifiée peut suffire lors de la phase d’intégration de cette PPE.

A contrario, les indicateurs comme quoi une PPE peut présenter un risque plus élevé sont notamment les suivants :

  • Facteurs géographiques – La PPE évolue dans un pays à haut risque, caractérisé par un niveau élevé de corruption, de faibles défenses contre le blanchiment d’argent, une criminalité organisée développée, une presse libre limitée, un système pénal qui manque d’indépendance ainsi que des registres à la transparence limitée.
  • Facteurs liés aux produits – La PPE souhaite accéder à un produit que l’établissement a évalué comme présentant un risque élevé d’exploitation à des fins de blanchiment d’argent.
  • Facteurs personnels – La PPE peut être identifiée comme ayant un style de vie ou une richesse personnelle incompatible avec les sources légales d’enrichissement ou de revenus, comme faisant l’objet d’allégations (crédibles) d’irrégularités financières ou comme susceptible d’influencer des projets de marchés publics, notamment lorsqu’ils ne font pas l’objet d’un appel d’offres, ou bien l’attribution de précieuses licences gouvernementales.

Les signaux d’alerte spécifiques aux membres de la famille et aux proches de la PPE sont notamment :

  • Une richesse tirée de l’attribution de licences gouvernementales
  • Une nomination à une fonction publique qui semble incompatible avec le mérite public
  • Une richesse et un mode de vie incompatibles avec les sources légales connues d’enrichissement ou de revenus
  • Une richesse provenant de secteurs où la concurrence fait défaut ou avec d’importantes barrières à l’entrée
  • Une richesse tirée d’un accès préférentiel à la privatisation d’anciens actifs de l’État.

Dans ces cas de figure, une obligation de vigilance renforcée du type de celle décrite ci-dessus doit être réalisée avant l’intégration de la PPE.

Délais

Que se passe-t-il lorsqu’une PPE n’occupe plus une fonction publique importante ?

Le GAFI admet que la formulation actuelle ne pose pas de limite dans le temps et fait sienne l’expression « PPE un jour, PPE toujours ». Cependant, il suggère qu’une fois le mandat public d’une PPE arrivé à échéance, il ne devrait pas y avoir de délai de prescription pour cette personne, mais plutôt la mise en place d’une approche fondée sur le risque à partir du moment où cette personne n’est plus considérée comme une PPE.

Dans ce contexte, l’approche basée sur le risque implique une évaluation (i) du niveau d’influence informelle que la PPE continue d’exercer et de l’ancienneté du poste ; et (ii) de tout lien (formel ou informel) entre le poste précédent et actuel de la PPE.

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Concrètement, de nombreuses juridictions continuent d’appliquer une obligation de vigilance renforcée pendant au moins 12 mois après la fin du mandat public ou aussi longtemps que nécessaire.

Pour ce qui est des membres de la famille et des proches collaborateurs, il n’y a pas de prolongation de la période au-delà de la date à laquelle la PPE cesse d’exercer une fonction publique importante.

L’utilisation de bases de données

Les entreprises ne sont pas contraintes de réaliser des enquêtes approfondies pour déterminer si un client est effectivement une PPE. Elles doivent plutôt tenir compte des informations en leur possession ou connues du public. Il peut notamment s’agir :

  • D’informations du domaine public, dont celles publiées sur des sites Web officiels et des sites Web de sources d’informations fiables et d’organisations non gouvernementales crédibles
  • De registres publics
  • De bases de données commerciales

Il faut impérativement s’assurer que les bases de données utilisées, publiques ou commerciales, sont à la fois complètes, dynamiques et actualisées.

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En conclusion

Le GAFI insiste clairement sur le fait que ses exigences envers les PPE ne doivent en aucun cas être interprétées comme une volonté de stigmatiser ces dernières. Selon le GAFI, il serait donc dommage de refuser une relation d’affaires avec une PPE tout simplement parce qu’un client est identifié comme tel. De telles réactions seraient contraires à la fois à la lettre et à l’esprit de la recommandation du GAFI en la matière.

Dans la mesure où il existe des dizaines de milliers de PPE nationales et étrangères, ne prendre aucun risque en refusant d’intégrer une PPE en raison d’une quelconque information la concernant n’est pas une solution pour les établissements financiers et non financiers. Faire des affaires implique inévitablement d’intégrer des personnes occupant des postes politiques importants. Par conséquent, les établissements doivent pouvoir s’appuyer sur des ressources logicielles qui leur permettront d’identifier correctement ces personnes politiquement exposées et d’utiliser ces mêmes ressources pour prendre la bonne décision en matière de risque et, en fin de compte, au niveau commercial.

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p/o Virginie Gastine Menou

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