
L’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (EIOPA) a publié son « Final Report on revised Opinion on internal models with DVA | Solvency II Review ». Cette révision précise le traitement de l’ajustement de valorisation de la dette (Debt Valuation Adjustment, DVA) dans les modèles internes, renforce les attentes prudentielles en matière de gouvernance, de méthodologie, de données et de validation, et aligne le cadre sur les objectifs de la revue Solvabilité II. Pour les assureurs utilisant un modèle interne (total ou partiel), le rapport clarifie les pratiques acceptables en matière de valorisation, de calibration et de gestion du risque de crédit propre et des effets DVA, ainsi que les exigences de transparence et de documentation à l’attention des autorités de contrôle nationales.
La révision s’inscrit dans la dynamique de la revue de Solvabilité II et vise à assurer l’harmonisation du traitement des ajustements de valorisation (dont la DVA) dans les modèles internes approuvés. Elle précise la manière dont les entités doivent intégrer ou exclure la DVA de l’évaluation des passifs et de la mesure des exigences de capital, en cohérence avec les principes prudentiels et la protection des preneurs. Le rapport final constitue une opinion révisée adressée aux autorités nationales, servant de référence de supervision pour l’examen des modèles internes.
La DVA reflète l’impact du propre risque de crédit de l’entité sur la valorisation de ses engagements. L’Opinion révisée rappelle que tout choix méthodologique (inclusion/exclusion de la DVA) doit être justifié, stable, transparent et prudent, et qu’il ne doit pas conduire à une sous-estimation des provisions techniques ni du capital de solvabilité requis. Les critères de matérialité guident l’effort de modélisation, tout en imposant des tests de sensibilité et des analyses de backtesting proportionnés au profil de risque.
Les autorités attendent des modèles : une méthodologie économiquement cohérente, des calibrations robustes sur données de qualité, une traçabilité complète, une gouvernance forte (rôle des fonctions clés, challenge indépendant, modèle de limites), et une validation périodique documentée. Les changements de modèles (politiques de changement majeur/mineur) doivent couvrir explicitement les paramètres et hypothèses DVA et leurs dépendances avec les facteurs de marché et de crédit. Les dispositifs d’use-test et de P&L attribution doivent démontrer que les effets DVA ne dégradent ni la gestion des risques ni la comparabilité.
La valorisation des passifs et instruments concernés par la DVA doit reposer sur des courbes et spreads observables autant que possible, assortis de jugements d’experts encadrés, d’ajustements conservateurs en cas d’incertitude et d’une documentation détaillée des sources, interpolations et extrapolations. L’Opinion insiste sur la transparence : articuler clairement la place de la DVA dans les états prudentiels, les écarts avec la comptabilité, et les impacts sur l’appétence au risque et la liquidité.
La fonction gestion des risques doit piloter un cadre de contrôle couvrant la DVA, incluant des KRIs, des seuils d’alerte et des scénarios inversés. La validation indépendante doit tester les hypothèses critiques, la stabilité des calibrations, la sensibilité aux chocs et les dépendances (corrélations, copules) affectant la DVA. Les constats et plans d’actions doivent être suivis par la direction et présentés au superviseur.
Les autorités nationales utiliseront l’Opinion révisée comme grille d’évaluation des modèles internes, en demandant des analyses d’impact, des comparaisons de pratiques et, au besoin, des remédiations. Le reporting prudentiel devra expliciter la matérialité des composantes DVA, les méthodologies, les tests de robustesse et les limites.
Les compliance officers devront mettre à jour le référentiel de conformité des modèles internes, aligner les politiques de changement et de validation, renforcer la traçabilité de la DVA dans les décisions de gestion et s’assurer de la cohérence entre documents internes, reporting aux autorités et communication financière.
Pour intégrer efficacement cette Opinion révisée, les assureurs doivent articuler une doctrine écrite sur la DVA, cartographier l’exposition, définir des métriques de suivi, enrichir le dispositif de validation et mettre à jour la politique de changements de modèle. Les équipes risques, actuariat, finance et conformité doivent converger vers une vision commune, afin d’éviter les arbitrages de valorisation et d’assurer la primauté du principe de prudence. Les autorités attendront des preuves tangibles d’« use-test » démontrant que la DVA est comprise, pilotée et intégrée aux décisions. La priorité sera donnée à la qualité des données, à la justification des jugements d’experts, et à la clarté du reporting.

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