EIOPA 2025 : points clés pour Conformité & Risques

Christophe BARDY - GRACES community
10/11/2025
Propulsé par Virginie
Cet article est réservé aux membres GRACES.community

European Insurance Overview Report 2025 (EIOPA) : ce que doivent retenir les équipes Conformité et Risques


Contexte et portée du rapport

L’European Insurance Overview Report 2025, publié par l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (EIOPA), dresse un panorama détaillé du secteur européen de l’assurance, de sa résilience prudentielle et des tendances clés qui impactent la conduite des affaires, le pilotage des risques et les priorités de conformité. Ce document consolide des informations issues des reporting prudentiels Solvabilité II, des analyses sectorielles EIOPA et des échanges avec les autorités nationales compétentes, avec pour objectif d’éclairer la supervision et la gestion des risques à l’échelle de l’Union.


Résumé exécutif pour Compliance Officers et Risk Managers

Le rapport 2025 met en exergue des thèmes structurants : résilience capitalistique soutenue par des ratios de couverture du SCR globalement élevés, pression persistante sur la rentabilité technique de certaines lignes (notamment auto et catastrophes) dans un environnement d’inflation des sinistres, exposition croissante aux risques physiques et de transition climatiques, élévation des exigences de gouvernance et de données non financières (ESG), maturité hétérogène en matière de cyber-résilience, abordabilité/assurabilité de certains risques, et vigilance renforcée sur la protection des assurés dans un contexte de numérisation et d’innovation (IA, distribution digitale, open insurance). Les points d’attention portent sur la qualité des données, l’ORSA et la matérialité ESG, l’appétit au risque face aux événements extrêmes, la souscription responsable, la chaîne de distribution et la transparence envers les clients, ainsi que l’alignement des politiques d’investissement avec les cadres européens.


Panorama prudentiel : solvabilité, capital et liquidité

Les assureurs européens affichent, selon EIOPA, des niveaux de solvabilité robustes portés par des fonds propres de qualité (Tier 1 principalement) et des exigences de capital stables malgré la volatilité de marché. L’analyse par classes d’activité montre des écarts : l’assurance non-vie demeure exposée aux pics de sinistralité (événements climatiques extrêmes et inflation des coûts de réparation), tandis que la vie profite d’un environnement de taux ayant soutenu les marges financières, sous réserve d’une gestion active des garanties de long terme et de la liquidité en cas de rachat.

Points opérationnels : renforcer les capacités d’ALM en scénarisant des chocs de courbe des taux et de spread, intégrer des scénarios combinés marché/liquidité dans les plans de financement en situation de tension, et s’assurer de la cohérence entre l’appétit au risque, les limites opérationnelles et les tolérances SCR/ORSA.


ORSA, gouvernance et qualité des données

L’ORSA demeure l’outil central d’anticipation des vulnérabilités : les meilleures pratiques incluent des scénarios inversés, l’intégration des risques émergents (cyber, IA, dépendances tiers) et la quantification structurée des risques climatiques sur des horizons cohérents avec les engagements. EIOPA insiste sur la gouvernance des données, l’explicabilité des modèles internes/partiels, et la proportionnalité dans l’outillage (sans renoncer à la traçabilité et à l’auditabilité).

Points opérationnels : élever le niveau de maturité Data Governance (glossaire, lignéage, contrôles de qualité), documenter les hypothèses clés, mettre à jour la cartographie des modèles et instaurer des revues indépendantes périodiques.


Risque climatique : souscription, investissement et réassurance

La matérialité croissante des risques physiques se reflète dans la fréquence et l’intensité des événements (inondations, sécheresses, tempêtes) et dans leur corrélation potentielle intra/extra-lignes. Les risques de transition impactent la valeur des actifs et certaines expositions sectorielles. EIOPA attend une articulation claire entre stratégie, souscription (conditions, exclusions, prévention), réassurance (capacité, agrégation, accumulation) et investissement (engagements, cibles d’alignement).

Points opérationnels : revisiter les courbes de dommages, recalibrer les tarifs et franchises, renforcer la collecte de données géospatiales, tester des scénarios NGFS, ajuster les limites d’accumulation et diversifier les programmes de réassurance.


Inflation des sinistres et dérive technique

La pression sur la rentabilité non-vie résulte d’une inflation persistante des coûts (pièces, main d’œuvre, santé), d’effets qualité des réparations et de la complexité des sinistres. La discipline technique requiert des itérations de tarification plus fréquentes, une granularité élevée des segments et une coordination étroite actuariat/gestion des sinistres.

Points opérationnels : mettre en place des boucles courtes d’ajustement tarifaire, renforcer la détection de fraude, optimiser les réseaux de prestataires et intégrer l’IA avec garde-fous de conformité (biais, explicabilité, contrôle humain).


Cyber-résilience et dépendances critiques

Le secteur reste exposé à des risques cyber systémiques et à la concentration chez certains prestataires cloud. L’approche attendue combine prévention, détection, réponse et rétablissement, ainsi qu’une gestion contractuelle exigeante des tiers (SLA, réversibilité, tests). La convergence avec le cadre DORA suppose une gouvernance renforcée, une cartographie précise des services essentiels et une pratique de tests de résilience.

Points opérationnels : aligner le programme cyber avec DORA, conduire des tests de pénétration et de restauration réguliers, étendre la surveillance aux sous-traitants de rang 2/3 et intégrer les scénarios cyber dans l’ORSA.


Distribution, protection des assurés et conduite du marché

La digitalisation accélère la distribution directe et multi-canal, tout en posant des défis en matière d’accessibilité, de transparence et de gestion des conflits d’intérêts. EIOPA met l’accent sur l’adéquation produit-client, les tests de produits (POG), l’information précontractuelle claire, la gestion des réclamations et la surveillance des partenaires de distribution.

Points opérationnels : renforcer le Product Oversight & Governance, monitorer les indicateurs de résultat client, améliorer la lisibilité des documents et déployer des contrôles sur les canaux digitaux et les agrégateurs.


Durabilité, reporting et alignement réglementaire

Les attentes en matière d’ESG progressent : articulation avec la Taxonomie UE, cohérence des disclosures et gestion des risques de greenwashing. La qualité et la comparabilité des données ESG demeurent des défis majeurs, appelant à des contrôles internes spécifiques, des méthodologies robustes et une documentation précise des limites.

Points opérationnels : mettre en place des contrôles de greenwashing, structurer une gouvernance ESG transversale, consolider les sources de données et aligner les engagements d’investissement avec les cadres européens pertinents.


Stress testing et préparation aux crises

EIOPA encourage des exercices réguliers de tests de résistance, intégrant des scénarios extrêmes mais plausibles et des chaînes causales multi-risques (marché, liquidité, opérationnel, cyber, catastrophes). L’enjeu consiste à transformer ces enseignements en plans d’action opérationnels, budgétés et suivis.

Points opérationnels : définir une librairie de scénarios, relier les résultats aux limites et à l’appétit au risque, et intégrer ces éléments au cycle budgétaire et à la planification stratégique.


Assurabilité et accessibilité des risques

La montée des risques difficiles à assurer (catastrophes naturelles, cyber) impose des approches combinant prévention, mutualisation, partenariats public-privé et innovation en réassurance. Le dialogue avec les autorités et les parties prenantes devient critique pour maintenir l’accessibilité et la pertinence des couvertures.

Points opérationnels : revoir les politiques d’acceptation, explorer des mécanismes de mutualisation, renforcer l’éducation des assurés et mettre en place des indicateurs d’accessibilité.


Conclusion

Le rapport 2025 d’EIOPA confirme une robustesse prudentielle globale, mais souligne des zones de vulnérabilité opérationnelle (données, cyber, inflation des sinistres) et des défis stratégiques (climat, distribution digitale, durabilité). Les fonctions Conformité, Risques et Contrôle interne ont un rôle moteur pour renforcer la gouvernance, fiabiliser les données et soutenir la décision dans un contexte d’évolution réglementaire et de chocs exogènes.


Quelques pistes pour l’intégration opérationnelle dans votre dispositif :

  • Mettre à jour l’ORSA avec des scénarios climatiques, cyber et de liquidité combinés, et relier les résultats aux limites opérationnelles et au plan d’actions.
  • Élever la gouvernance des données (qualité, lignéage, contrôles) et renforcer la revue indépendante des modèles clés.
  • Durcir le POG et la surveillance de la distribution digitale, avec des indicateurs de résultat client et des contrôles de communication.
  • Aligner la résilience opérationnelle avec DORA : cartographie des services essentiels, tests et gestion des tiers critiques.
  • Mettre en place des contrôles anti-greenwashing et une consolidation des données ESG pour des disclosures cohérents et auditables.
Envie de lire la suite de l’article ?
Il vous reste 50% de l’article à lire
Inscrivez-vous sur GRACES.community pour profitez de toute l’actualité compliance
directement depuis votre espace Membre !
M'inscrire

Plus de 200 sociétés ont trouvé leur compliance officer avec GRACES.community,

et si c’était vous ?